Pourquoi, quelques dizaines d'années plus tard, faut-il que je me souvienne encore d'une comptine de mon livre d'apprentissage de la lecture, en CP ?
Roudoudou n'a pas de femme,
il en fait une avec sa canne,
il l'habille en feuilles de chou :
voilà la femme à Roudoudou.
Bijou, caillou, chou, genou,
hibou, joujou, pou.
Cela ne m'a pas marqué à l'époque, ou alors à mon insu. Quand je réouvre aujourd'hui mon livre "le nouveau sablier 1", je constate que celui-ci a conservé son odeur. Je redécouvre un apprentissage par phonème, [u] était celui de Roudoudou. Il y avait des "mots vedettes", des "costumes" de phonème rangés dans des "placards", … Sur la couverture est également écrit "initiation à la langue écrite", belle expression pour quelqu'un comme moi qui affectionne les mots et préfère souvent les écrire plutôt que de les dire !
La méthode a dû porter ses fruits, je n'ai pas eu de difficultés pour apprendre à lire ou à écrire. Je voudrais me rappeler du premier instant où j'ai lu et compris un mot, de ma première écriture cursive mais la satisfaction de ces précieux moments s'efface vite devant l'immensité des autres découvertes à venir !
Feuilleter patiemment mon grand livre "abécédaire" pour apprendre, encore et encore, nommer chaque chose, enrichir mon vocabulaire. Finalement, curieusement, certains mots me correspondaient déjà…
C comme châtaignes
F comme feu
I comme iris
K comme kimono
N comme noix
O comme oiseaux
Q comme quartz
R comme rose
T comme trompette
Z comme zèbre
Depuis, je n'ai jamais cessé d'écrire : mes petites histoires, des rédactions, des dissertations, des poèmes, des chansons, des lettres amicales, des courriers officiels, des délibérations, mes fragments aujourd'hui !...Ecrire pour moi, écrire pour les autres, mes proches ou des inconnus, offrir mes textes, les partager, toujours, cela ne m'a jamais vraiment quitté.
D'une cueillette d'idées, de situations, des mots viennent, circulent, affluent. Parfois, ils se bousculent, parfois ils se maturent, prennent leur temps. D'abord, sans doute, dans le cerveau, pour l'ordre et la rigueur, le réservoir à mots. Puis le cœur s'en mêle et vient teinter tout cela d'émotions, de ressentis. Ensuite, dans le meilleur des cas, l'âme donne de la profondeur, de l'écho, de la résonnance. Comme une gestation plus ou moins longue, je donne naissance à une partie de moi. Mes mains fabriquent mes mots, de la pointe du stylo, les mettent en lumière, urbi et orbi.
Photo par lambda quotidien
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